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Pour ceux de 14
14 juin 2007

Vue par Jean MAROT, du 256e R.I. ...

Affiche_mobilisation

à Montceau-les-mines, où il était inspecteur primaire .

Extrait de son livre Première rencontre avec ... Souvenirs de la mobilisation et des premiers mois de la guerre, 1926, Imprimerie Générale et Administrative du Pogrès de Saône-et-Loire

LA MOBILISATION

Montceau-les-Mines, 1er au 3 août 1914.

Depuis midi, devant la mairie et la poste stagne une foule silencieuse, qui n'a rien à dire, puisque tout le monde pense la même chose : l'invraisemblance de l'inévitable. On sait que la dépêche attendue va venir ; il n'y a aucun espoir qu'elle n'arrive pas, mais quarante-quatre ans d'attente ont usé la croyance à la guerre. Un doute, plus tenace que l'espérance, se mêle à l'angoisse, avec une curiosité un peu badaude, comme en attendant une éclipse ou une comète.

  A cinq heures, un agent placarde, au haut du perron l'affiche blanche. On se rue pour la lire, comme si on ne savait pas ... Un peu sèche, au gré des cœurs battants, cette annonce du « premier jour de la mobilisation ", euphémisme administratif pour ménager les nerfs de la nation: la mobilisation, ce n'est pas forcément la guerre. On le dit, on fait semblant de le croire, parce que les femmes, déjà, pleurent.

[...]

Des clairons, sortis je ne sais d'où, sonnent la « générale » à  tous 1es coins de rues. Nouveaux pleurs des femmes, que déchire cette mélopée lugubre.

Dès le soir des hommes partent. Des trains passent tous les quarts d'heure, bondés de soldats, de chevaux où de réservistes. Au passage à niveau, la foule se renouvel1e et demeure, curieuse sans bien savoir de quoi, muette, sous les clameurs de ceux qui s'en vont, et que ce déracinement excite comme une aventure. II crient pour crier, on ne sait quoi d'indistinct qui traîne en sillage derrière les trains, avec les fumées.

Le 4 au matin, c'est mon tour. La place de la Gare, pleine déborde sur les quais, lentement, sans bruit, sans bousculades. Chacun prend le train qu'il veut; choisit le vagon qui lui plaît. Pas le moindre gendarme, que ferait-il ? Il n'y a ni poivrots ni discoureurs . Les hommes sont calmes, un peu tendus, mais sans crâner. Tout de suite camarades, ils s'amusent à se tutoyer, déjà égaux, avant l'uniforme. Les femmes se tiennent; elles pleureront quand le train démarrera, devant le quai nu et la place vidée.

Et pourtant ...

Si l'on en croit ce document  des Archives Départementale de Saône-et-Loire, les autorités la redoutaient fort, cette mobilisation montcellienne .

Opinion_2Opinion_3

Rapport du Commissaire spécial de Chalon-sur-Saône au préfet sur la situation de l’opinion publique à la date du 19 août 1914 (M 174), en ligne sur :  http://www.archives71.fr/index.php?module=cms&action=get&id=2007041112104255

* Jean MAROT est distingué par Jean-Norton CRU qui, dans son monumental Témoins, le place en Classe I  aux côté des GENEVOIS, GALTIER-BOISSIERE et autres LINTIER . Il partage cet honneur avec un autre saône-et-loirien, l'autunois Paul CAZIN, mobilisé lui, au 29e R.I. .

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